Athènes. Assis un soir à la terrasse du café Kolonaki, Claude écoute son ami Pierre Diamantis raconter l’histoire d’un banal accident de voiture qui résonne en lui comme un fatal déclic : « tout est perdu ». S’organise alors une sorte de théâtre intérieur où sont convoqués images et souvenirs. C’est d’abord cet ami qui s’est suicidé à New-York deux ans auparavant. Il part ensuite à la découverte de ce qu’il a de plus ancien et de plus caché : l’amour pour sa mère disparue lorsqu’il était enfant et devenue la « jeune géante », personnage d’une mythologie empruntée à Baudelaire : « Du temps que la Nature en sa verve puissante/Concevait chaque jour des enfants monstrueux/J’eusse aimé vivre auprès d’une jeune géante/Comme aux pieds d’une reine un chat voluptueux ».
En cercles concentriques, les souvenirs passent et repassent, obsédants. Claude est prisonnier de sa névrose, lui dont « on pouvait être sûr, si on l’avait croisé joyeux à Bangkok de le retrouver quelques mois après, à Athènes, désespéré ». Dans ce roman quasi freudien, Jean Blot fait le récit complexe d’un voyage intérieur, de la lente et douloureuse libération des puissances de la nuit, du désespoir et de la mort et d’une maturité enfin conquise contre les envoûtements de l’enfance. Une maturité qui passe, pour Claude, par le renoncement de sa « voix seconde », son instinct de création. « L’aube se levait sur Athènes et ses doigts étaient gris » : cette jolie phrase clôt le livre comme l’épreuve de son héros.
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