Marguerite Yourcenar

Jean Blot n’a pas choisi Marguerite Yourcenar par hasard. Seule femme à figurer dans ses biographies et essais, elle provoque en lui une sorte de « vertige ». Non pas la femme, mais l’œuvre si bien qu’il évoque ainsi « le » critique, « le » romancier, « le » biographe ou « le » poète. Une question le taraude d’emblée : où est « le centre », « l’intuition essentielle » qui porte Yourcenar à se saisir de sa plume ?

Quel chemin relie, en effet, ses traduction du poète Constantin Cavafy à celles de Ce que savait Maisie d’Henry James, de Virginia Woolf ou des Negro Spirituals ? Qu’ont de commun le maître du roman américain, la voix sensible de la littérature anglaise ou Mishima et sa vision du vide ? Jean Blot veut y voir l’importance de l’écart qui sépare Yourcenar et l’écrivain, sa vie et son temps. C’est ainsi que l’on passe de la Grèce antique de Pindare et de La couronne et la Lyre aux Flandres de Souvenirs pieux ou d’Archives du Nord sans avoir besoin, ce qui serait un contresens, de se référer à une quelconque biographie.

Si Jean Blot voue une telle admiration pour Yourcenar, pour la trajectoire qui la mène du Coup de grâce aux Mémoires d’Hadrien et à L’œuvre au noir, c’est qu’il devine combien elle a sacrifié le souvenir trop ardent à la mémoire qui est un « souvenir sans visage ». Et de décrire ainsi sa démarche si singulière : « Romantique de l’antiromantisme, puritaine du paganisme, éléate par angoisse de la durée, cherchant refuge dans la culture que son ardeur fait aussitôt éclater, apologiste démesurée de la mesure ».

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